Explication sur le collaboratif, le monde qui change, le garde-meuble
L’économie dite collaborative fait débat et polémique, même si tout ne tourne pas autour d’elle.
Vous vous demandez peut-être ce qu’est l’ubérisation ? Il s’agit d’un changement rapide des rapports de force grâce au numérique. Au carrefour de l’économie de partage, de l’innovation numérique, de la recherche de compétitivité et de la volonté d’indépendance des Français, ce phénomène impacte petit à petit les secteurs traditionnels de notre économie de services.
Mais avant tout, posons-nous la question : Qu’est-ce que l’économie collaborative ? Cela date de l’arrivée d’internet, quand on a ouvert la logique des commentaires et des forums. Chaque personne est devenue un émetteur d’information. Aujourd’hui, cette logique est sortie de nos écrans et elle s’applique à nos modes de consommation. On n’est plus juste quel qu’un qui va acheter mais qui peut aussi revendre etc. On peut devenir prestataire de service : je vais proposer un trajet, je vais louer ma voiture quand je ne m’en sers pas, je vais louer mon appartement, je vais louer ma cave, mon garage… D’une certaine manière, on se pose maintenant en producteur. Sur ce constat, on se dit que la société peut changer. On n’est plus de simple consommateur, on devient des contributeurs. Les rôles sont en train de changer.
Mais sinon, c’est quoi exactement l’économie collaborative ? On y met la consommation collaborative (covoiturage, mode de vie collaboratif, collocation…), la finance collaborative (prêt de particulier à particulier, le crowdfunding), la production dite contributive…
Mais de quoi parle-t-on exactement ? C’est compliqué de lui donner une définition. Si l’on regarde vraiment les choses, on aime mettre des mots chapeaux, mais on n’explique jamais ce qu’il y a sous le chapeau, En réalité, on observe qu’il y a des mécanismes immémoriaux : le fait d’échanger, d’être entre particuliers… Cette économie du troc, du partage n’a pas été inventé. Au tout début, on parlait de l’économie sociale et solidaire. Puis, on a fait un « maquillage sémantique » en utilisant un mot qui plaît à tout le monde, qui est universel, qui est plus acceptable par la population, le mot « collaboratif ». Ensuite, il y a le côté flower power, dit communautaire.
Ce que nous retenons, c’est qu’il y a une économie de la nécessité. Aujourd’hui, on voit bien que l’accroissement des revenus, l’élévation sociale est très difficile, voire plus possible. Les gens se demandent comment réduire leurs coûts plutôt que de trouver une solution pour accroître leurs revenus. Aujourd’hui, nous avons un outil qui est le digital. Il permet de donner une dimension industrielle à cela. Grâce à une technologie universelle qui permet de donner une taille très importante, voir à outrance. Ce qui rend possible cela est Internet.
Fait-on du neuf avec du vieux ? Oui et non. On fait du neuf sur des vieux mécanismes que sont le troc etc. En réalité, nous sommes en train de vivre une mutation de l’entreprise, du travail et du marché lui-même. Certains sites vont dans le bon sens comme le système de Wikipédia, où l’on va partager son savoir, sans but lucratif. Ou d’autres ou l’on peut échanger une tondeuse contre une perceuse, sans monétisation etc.
Nous avons de nouveaux modèles qui se construisent.
On partage son savoir, du service etc. Cela va dans le bon sens. Mais, en même temps, on voit que les états ont du mal à s’adapter, que certaines plateformes confrontent un état de fait par rapport à un état de droit. Derrière ces mécanismes, ce n’est pas un monde idyllique ou chacun est indépendant, ou chacun va décider de ce qu’il veut faire. Il y a des plateformes qui tentent d’être en situation de monopole. Il faut dire les choses, ce n’est pas la concurrence pure et parfaite. Chacun n’est pas l’égal de l’autre. Quand on détient le cloud, quand on le maîtrise, quand on détient le data (les données), quand on défini les algorithmes, bref quand on maîtrise les trois, on a un pouvoir sur les autres qui est très important. C’est pour cela qu’il faut une réflexion sur le numérique, quels sont les rapports de force ? La start-up qui veut créer et innover (la base est souvent bonne) est parfois confrontée à des modèles qui imposent leurs règles hyper- capitalistiques.
La réalité est qu’il y a plus d’un million de français qui sont des slashers. Ils cumulent une activité, souvent de travailleur indépendant, avec une activité de salarié. Ce phénomène n’est pas nouveau, mais il augmente avec certaines plateformes. C’est une des raisons qui pousse aussi l’Etat à légiférer notamment sur la protection sociale de ces travailleurs indépendants. Aussi, ces nouvelles entreprises créent des emplois et créent de nouveaux besoins. Souvent, elles inventent une nouvelle manière de consommer. La tendance mondiale est la recherche de rencontres, d’échanges et d’authenticité. Grâce à Internet, nous avons des marchés qui se développent.
Oublions le collaboratif et prenons cela comme une économie supplémentaire avec un nouvel outil.
En gros, il y a une toute petite partie de la population qui fait un choix. Elle souhaite prendre de l’agriculture en circuit court, d’un agriculteur qui ne met pas de pesticides ou d’autres trucs négatifs. Je vais donc directement consommer chez moi, avec un transport minimisé. Cela représente environ 3% de la population. Comme le dit la phrase célèbre « il faut avoir les moyens pour avoir de la conscience ». Et vous avez 97% des gens qui choisissent cette économie par nécessité, faute de capacité d’accroître leur revenu, pour réduire leur charge.
Si je suis un investisseur qui investit dans Airbnb, Uber, Movinga pour le déménagement, Ouistock pour le garde-meubles ou autre, je suis un hyper capitaliste. La mentalité de ce type d’investisseur est de savoir comment créer un champion mondial, très rapidement, sans aucune concurrence. Pour moi, qui suit entrepreneur avant tout et libéral, depuis maintenant 6 ans, c’est juste insupportable d’entendre cela. Moi je veux gagner dans ma boîte (location-gardemeuble.fr), parce que je suis le meilleur, pas parce que, grâce à l’argent dont je « dispose », j’ai totalement rasé le marché. (cf levée de fonds ouistock, costockage, jestocke de plus de 4 millions d’euros maintenant sur le marché du garde-meuble. Ou plus sérieusement de Movinga 42 millions en 2 ans, sans parler d’Airbnb ou d’Uber ).
Il s’agit aussi d’une économie de contournement. Parce qu’on n’a pas eu le courage de réformer l’économie, de la libéraliser, les gens font par le bas ce que le haut leur a refusé.. Grosso modo, il trouve des techniques de contournement, qui pour l’instant disruptent le marché, bouleversent, donnent du déséquilibre, et du coup il y a deux camps. Les libéraux béa « Ah ! c’est fantastique cette économie » et les dogmatiques « Ah, paupérisation et précarisation ». D’où, toutes les confrontations. Mais personne ne regarde d’en haut en disant, c’est intéressant de voir cette économie, laissons la vivre, avant de la tuer. Ce que l’on fait aujourd’hui en France, on taxe, on charge, on interdit, on l’accuse de tous les maux pour mieux l’étouffer très rapidement, et au final on aura qu’une chose, des nains.
Le temps est donc venu à une régularisation.
On vit le far west collaboratif mais l’étau se resserre. Rappelons que cette économie est assez neuve. Cela signifie que l’on demande à des entreprises comme Airbnb, Uber, d’être au niveau des sociétés actuelles qui arrivent parfois à bout de souffle. Laissons le temps de voir ce qui se passe en France, à l’international. La France est un pays très corporatiste. L’économie collaborative se développe fortement. Nous sommes deuxième, après les Etats-Unis. 38% (mais les sources varient) des travailleurs de ces plateformes étaient au chômage ou déconnectés du marché de l’emploi du fait de leur origine ethnique Dans un premier temps, c’est loin d’être un job parfait, mais cela représente souvent le premier job de certaines personnes. Elles ont accès à un emploi, à des revenus. C’est toujours mieux que de rester coincé chez soi à ne rien faire.
Par exemple, quand on interroge les personnes qui travaillent pour la livraison de repas, ils sont indépendants. Mais, tu t’aperçois que ce sont des étudiants et des gens issus de l’immigration, personnes qui ont le plus de mal à accéder au marché de l’emploi. C’est l’aboutissement de ce que le capitalisme a toujours voulu faire : flexibilité totale du travail, et des emplois très précaires. A ce moment, on touche de près, la paupérisation, la dérégulation du marché de notre économie et les problèmes posés aux « salariés » de ce secteur.
Certaines plateformes, dans leur pratique, de la relation avec ces travailleurs dits indépendants, s’assimilent plutôt à un lien de subordination. On peut déconnecter un travailleur indépendant, sans dialogue social, du jour au lendemain, ne lui permettant plus de travailler avec cette plateforme. Il y a un problème. Lorsque vous définissez les prix tout seul, sans dialogue commerciale, il y a un problème, On voit bien que ces plateformes soulèvent de nouveaux sujets. Et quelle protection pour ces travailleurs indépendants. Par exemple, comment je fais pour avoir accès à un logement quand on me demande un contrat de travail ? Comment je fais si je n’ai plus de contrat, je n’ai plus de ressources, pour faire face aux dépenses de la vie courante ?
Des entreprises du monde « traditionnel » se soulèvent et boycottent car les régimes fiscaux sont totalement différents par rapport à ce monde qui émerge. Elles sont frappées par une concurrence déloyale (cotisations sociales, fiscales).
Quelles solutions ?
On va vers une réforme emploi-salarié et emploi-indépendant. Les travailleurs indépendants de la plateforme qui ne sont pas indépendants (chez uber, par exemple) devront être mieux protégés. Reste à savoir qui paiera ? Certains syndicats s’y penchent, sont force de proposition. On va y arriver !
Si uber est valorisé 100 milliards, ne faut-il pas que les gens qui font cette richesse (les conducteurs) soient actionnaires de leur entreprise ? Même si cette valorisation ne veut pas dire grand-chose aujourd’hui.
L’Etat légifère. Petit à petit ce marché va se réguler. De nombreuses discussions sont en cours et aboutiront, à plus ou moins court terme, à des réponses sur les grands axes que sont la fiscalité, la protection sociale, la protection des biens et des consommateurs etc
En résumé
Ne mettons pas tout le monde dans le même panier. Il y a les plateformes qui ne réalisent pas la transaction et celles qui réalisent la transaction financière et qui contrôlent au maximum. Comme celles qui sont implantées en France et celles à l’étranger (hors Europe). En France, certaines plateformes intègrent cette notion de protection du salarié ou plutôt du travail indépendant non indépendant, mais elles sont très rares. Certaines plateformes jouent dans les règles du win-win-win ou du win-win.
Il n’y a pas de solution unique pour les plateformes dites collaboratives car elles sont très différentes. Il y a des solutions individuelles, en fonction des personnes et des modèles adoptés. Il y a de grandes différences entre les acteurs, selon le schéma adopté.
Cette économie crée de la valeur. Nous voulons de cette économie. Mais pas comme elle est, sans règle, dans un floue juridique… Il faut mettre un peu d’ordre ! Responsabiliser ces plateformes. Cela ne doit pas être une zone de non droit. A suivre…